Guilhem Molinié est diplômé de la formation Administrateur. Engagé depuis avec Médecins Sans Frontières, il était en mission au Darfour lors de la crise de 2003, en Sicile auprès des Migrants en 2006, ou encore en Afghanistan de 2014 à 2016. Il est aujourd’hui directeur général de la section Afrique du Sud de Médecins Sans Frontières.

« Pour moi, c’est un challenge complètement différent du terrain, gérer une organisation de racines européennes qui s’implante sur un autre continent, avec un conseil d’administration composé de gens de la région, des Sud-Africains, des Zambiens, des gens du Lesotho, des Zimbabwéens… La section héberge aussi l’équipe internationale spécialisée sur le VIH et la tuberculose, qui apporte l’expertise médicale sur ces sujets à l’ensemble du mouvement MSF. Je me concentre essentiellement sur 3 objectifs : impulser une plus forte connexion avec les opérations dans le monde entier tout en conservant des interventions dans cette région ; renforcer la diversité des équipes en garantissant un accès égal de tous à tous les postes ; et développer la collecte de fonds auprès de la société civile.

C’est particulièrement intéressant dans ce contexte d’une Afrique du Sud marquée par de fortes disparités entre les très riches et les très pauvres. On a 40 000 donateurs aujourd’hui, ce qui représente environ 1,8 millions d’euros de collecte. L’image de MSF y est assez bonne. Elle est liée aux opérations internationales, mais aussi à l’histoire de MSF en Afrique du Sud qui s’est fortement impliqué dans le lobbying auprès du gouvernement pour garantir l’accès aux premiers anti-rétroviraux (ARV) à une époque où les Sud-Africains tombaient comme des mouches. MSF y représente une ONG qui se bat aux côtés des plus pauvres et des plus touchés contre des intérêts macro-économiques.

Ce qui m’accompagne encore aujourd’hui de mon année à Bioforce, c’est l’envie de faire, l’orientation vers l’action, la théorie qui a moins d’importance que la pratique, l’engagement et la gentillesse des formateurs et des étudiants, la camaraderie, le respect, la diversité des profils, dont beaucoup avaient déjà une expérience professionnelle. On est au milieu de gens qui se sont déjà frotté à la vie et ça c’est très fort chez Bioforce. Ça a été une très belle année pour moi. Je garde un attachement profond et je n’hésite pas à conseiller Bioforce. Mon souhait serait que Bioforce soit encore plus ouvert au monde anglophone, il y a tellement de besoins et pas de formations équivalentes.

Aujourd’hui, on a moins besoin de techniciens que de personnes qui arrivent à conjuguer compétences techniques et sens de l’humanité. Je ne sais pas si l’humanité est une compétence, mais en tout cas c’est une orientation précieuse dans ce monde où beaucoup d’acteurs essaient de tourner autour des crises humanitaires pour faire des choses qui ne sont pas toujours dans l’intérêt direct des communautés qu’ils prétendent servir. Il faut trouver le point d’équilibre et ne pas tout sacrifier à la compétence technique, il faut appuyer sur les compétences humaines au risque de se retrouver avec des humanitaires qui ne prennent pas de recul sur leurs interventions.

Et ça fait du mal à l’action humanitaire. Une école comme Bioforce a toute sa place parce qu’elle permet d’orienter les compétences techniques dans la bonne direction, en travaillant justement ces compétences humaines, ce savoir-être.  »
Photo : Médecins Sans Frontières


Cet article a été publié dans le numéro 1 de la Lettre d’Information Bioforce