Plus spécifiquement des équipes régionales de prévention et de riposte, dans la prise en charge des épidémies type Ebola auxquelles le pays est encore confronté. Le point avec Nicolas Pontiac, coordinateur opérationnel à Conakry, et Gaëlle Julien, coordinatrice au siège à Vénissieux.

Comment est né ce projet ? 
Gaëlle Julien : ce projet est né du constat que la réaction avait trop tardé dans la gestion de la récente crise Ebola, et que ce retard avait occasionné beaucoup de dégâts : Ebola a fait près de 2500 morts en Guinée à ce jour. Pour être efficace sans perdre de temps, pour éviter une propagation meurtrière, l’idée est née de mettre en place des équipes de prévention et de riposte mobilisables et opérationnelles rapidement dans chacune des régions guinéennes. Des équipes multidisciplinaires, composées de soignants, de logisticiens et d’hygiénistes. Car la riposte n’est pas seulement médicale : pour une réponse efficace, il faut des logisticiens et des hygiénistes capables d’organiser un centre de traitement, organiser le transport des malades et des échantillons, gérer les déchets, organiser des enterrements sécurisés, gérer les stocks, organiser une désinfection, etc.

Comment s’articule ce projet ? 
Gaëlle Julien : Expertise France, Bioforce et la Sécurité Civile française ont conçu ce projet, soutenu par l’Union européenne et le ministère des Affaires Etrangères français, et qui comporte 3 volets : la formation durable des équipes de prévention et de riposte et la formation de formateurs par l’Institut Bioforce, le déploiement des équipes et des équipements sur le terrain par la Sécurité Civile et Expertise France, et pour finir des actions de pérennisation pour que le Ministère de la Santé guinéen s’approprie le programme, et notamment la Cellule nationale de lutte contre Ebola.

Pourquoi Expertise France, qui est le chef de file sur ce programme, a-t-il fait appel à Bioforce ?
Gaëlle Julien : parce que l’Institut Bioforce a une expertise reconnue dans le renforcement de capacités, que nous sommes capables de mobiliser un réseau d’intervenants très rapidement et troisième élément, parce que nous avons déjà organisé une formation sur la gestion de programme Ebola en décembre dernier, en partenariat avec Médecins Sans Frontières Belgique, la Croix Rouge Française et l’Organisation Mondiale de la Santé.

Quel est le contenu de la formation que réalise Bioforce au profit de ces équipes de riposte ? 
Nicolas Pontiac : il s’agit d’une formation initiale de 11 jours qui permet de couvrir l’ensemble des thématiques d’une réponse efficace : le diagnostic et la prise en charge, la gestion logistique, l’épidémiologie, la communication communautaire et la promotion de l’hygiène, et la formation de formateurs pour que ces équipes de prévention et de riposte soient en mesure de dupliquer la formation auprès de leurs équipes sur le terrain. Actuellement c’est la 5e des 8 équipes qui est en formation au centre de Manéah, à 40 km de Conakry. Cette 1ère phase a commencé en avril et se terminera fin août. Elément très important pour nous : Bioforce s’appuie sur une ressource locale de 7 formateurs guinéens, qui ont été accompagnés les deux premières sessions et qui aujourd’hui animent seuls les formations. Ils se sont non seulement appropriés les contenus et les scénarios pédagogiques mais ils les ont même revus en fonction de ce qu’ils estimaient pertinent dans le contexte guinéen. C’est pour nous un premier gage de pérennisation ! Cette formation initiale sera complétée dans un deuxième temps, de fin août à juillet 2016, par des formations à la carte, déterminées en fonction des évaluations en cours : si l’on se rend compte par exemple qu’il faut former davantage d’épidémiologistes capables d’enregistrer les cas et de suivre les contacts de manière plus pointue, alors on proposera un renforcement spécifique sur ce domaine. Ce deuxième temps ne sera d’ailleurs pas réservé aux personnels de santé publique, on l’élargira à tous les autres acteurs impliqués dans la lutte contre les épidémies en Guinée comme les ONG, la Croix-Rouge ou encore l’OMS.

On le sait, l’épidémie continue de sévir ailleurs : avez-vous prévu de réaliser ce type d’action dans d’autres pays touchés chroniquement par des épidémies ? 
Nicolas Pontiac : nous avons en effet en tête de créer un schéma de formation sous-régionale, c’est-à-dire qui bénéficie à toute l’Afrique de l’Ouest. Parallèlement à la réalisation du programme actuel, nous commençons à développer cette idée et à rencontrer de possibles partenaires. Nous nous inscrivons résolument dans une dynamique de préparer les pays sans attendre la prochaine crise.